MICHEL ZIMBACCA
POEMES
Le centaure inoxydable
Au revers de l’averse
Aux cornes de la brume
Les frais tisons terminent
Un continent de sourires
Ces journées meurent d’être comptées
Chaque blanche minute étouffe
Un royaume qui perd la vue
Tout en se taillant de larges parts
Sous le cendrier des émotions
Un fleuve marche sur un volcan
Un sourire à la main
28 août 1951
Enfance de l’amitié
à Margarita et Jorge Camacho
Votre vol de profonde jeunesse
Notre nord en rêve d’orientations et de tables renouvelables à merci
Votre étoile de neige ardente levée comme la pierre qui porte l’ombre toujours de l’autre côté
Notre course apparente pour traverser le spectre des lumières
Votre loup dans l’échafaudage des démolitions
Notre loup dans la faim et la soif renouvelables en tables d’orientations et en neige levée comme un pain d’ombre à merci
Votre façon de porter l’ombre hors de ses échafaudages comme un levain ardent pour la cuisson des soifs et des faims
Notre désir d’aller ramasser l’ombre toujours de l’autre côté des marées de la rue
Vos exigences aux appels déliés de tous échafaudages et démolitions verbales
Nos préférences pour les faims et les soifs de vocables d’orientation traversant de tous côtés le spectre des lumières
Vos familiarités avec le champagne des marées de la rue océane où l’ombre cesse d’être portée à dos d’homme
Nos allées vos venues chargées des dons d’or du sourire des faims d’ombres renouvelables en vie saluée changée en jeunesse approfondie
Dire sans parler
C’est bien là
Pierres pains neiges faims
D’ici peu les merveilles
D’ici peu encore s’animeront les merveilles
D’ici peu toujours
Un art de l’écoute
La levée de l’ombre
Cerneront la boucle des merveilles
Août 1966

L’été indien
A ma JOIE-BENOÎT
Gueule de main verte dansée en plaine
Vécue en fresque dans les peaux
Ce charme fait face VIS-A-VIS-PÂLE
Vols et plongées
Et tout le vu voyant
De ce regard LONGUE -FLAMME-PORTEE
Sur TOUT-VU ton attelage
OGRE-REGRET à l’est
A l’ouest OGRE-PROGRES
Flash de l’oiseau tonnerre
Clichant vingt siècles en perce prolifiante
Sur NOTRE-FEMME-LA-SOURCE-PERENNE
Sur notre mère peut-être trente
Ce charme est fraternel FRERE-FENDU
Ce charme annulera ta croix
Prodige abrogeant COMBAT-DE-QUEUES
MÂLE-CONSCIENCE à l’aventure
Quand sous le scalp d’azur
Du même amour nous flécheront (fléchera ?)
Le portrait cramoisi QUI-DESCEND
Afin de ramener GRAND-MERE
A la jeunesse
Son premier rendez-vous
Avec NOUS-SOIT
On ne se sentira plus
Assassin ou ancêtre
Que de sa propre mort GOÛTE-LA-NEIGE
Ce charme fait face ON-NE-SE-SENT-PLUS
Ce charme efface l’ancien défaut de sœur
Comme s’accorde telle renouvelée de la larme
Au dit charnel
Toutes contractions des fumées parlantes
Accroissant CŒUR-DE-CŒUR
A cœur mieux on ne meurt
De cœur c’est un beau jour pour ta sœur
Qui perle de l’HÔTE-ENFANT
Et c’est BOUT-D’HORIZON qui écrêtera les grands bétons
Dont tous les BOIS-BRÛLES dévorent la réserve
Hormis le frère nécrophile
Toi WASHISHU tu seras chié
Parmi l’herbe à bison
Comme il convient aux restes de tes joies
Gueule de main verte dansée en plaine
J’obsède la joie
J’égaille le taciturne GIFLE-D’OBSIDIENNE
D’un rite à quatre claques orientées
J’alarme CONTRE-LES-PLEURS-LA-PLUIE
Ce charme fait face ŒIL-POUR-ŒIL
Et la vertèbre aux dents et tout en vanité
J’irais sourire à OS-RIEUR
J’irais baiser sa noix pensive
J’irais rendre bonheur aux deux GRAND-MERES-D’ŒDIPE
J’obsède et j’accoutume
Chant des jeunes misères sur champ du vieux malheur
Gueule de main verte dansée en plaine
J’obsède ce charme qui ne peut que d’enfance
Et tant qu’il réserve le rêve d’Eve
PEUPLE-DE-PEUPLES dévisage CIEL-DE-MOI-TOUS
Rien n’y voit
Tout ne bouge
Mais on entend le temps jeter du lest
Rien ne dit
Tout n’écoute
Mais on a retenu les frissons à l’amont de minuit
Crépitements
BOUCHE-QUE-VEUX-TU ?
Cueille à leurs mains oubliées
Les trésors de l’angoisse
Sépare de ma vie
Et recueille le silence
Avec de ta passion ce qui jamais n’a pu
Que se croire passif
Noue au baiser de ton clan
Noie dans PREMIER-CRI-VENU
Et entend ta réponse
Dispose grand JE
De l’être dont j’entretiens cet autre
Qui m’acharnera neuf aux traverses des clartés charnelles
Et puisqu’elle m’a dit nous
Dénomme-toi de celui qui te passe
Va sans dire
pour Anny
Sans cesse accédant ce rivage
Seul visage que tu ne saurais voir
dans toutes ses figures
touffeurs innombrables d’enfant
Augures muets des souffles qui nous pénétrant
les signes que tu ne fais à personne
charment sans trêve une fleur d’ascèse
qui n’est que ma plus ancienne maison
Mais je n’y tiens plus debout
l’enfant qui s’est gardé de l’antérieur
est allé voir
dans tes touffeurs innombrables de femme
il sera en toute suite
une femme-toi
dans la bouche un enfant
Tes calculs d’écureuil
L’étoile germée sortie de ton sexe
remontera comme elle veut
dans ta chevelure
bouclera à loisir
le temps qu’il lui faudra
pour choisir son gîte au ciel
poursuivie sous le bleu
bleu bleu de ton œil
comme une jeunesse du ciel
avril 1991
L’état sauvage
Il y a comme ça des bêtes qui vous regardent dans les yeux
sans peur ni aménité
Diastole n’ose pas leur demander leur nom
ni décliner le sien
sans de nues incivilités
sans signes de poils ou de plumes
sans échos de Babel assourdis
sans l’attente d’un temps qui inviterait le temps
Il y a comme ça des bêtes qui vous regardent sans peur ni aménité
Systole les aime sur le champ
fruits jaillissant
emportant la femme soldat Hopi
tuée en Irak ces derniers premiers jours
blanche nuage qui rampe
ombre du doute au désert mal sacré
mais forêt forée d’appâts sexuels
où le vent fraye
de son silence en si
parmi les yeuses aux orgasmes enfantins
pupilles dilatées à émerveiller douleurs et détresses
à renaître de l’interrogation
où s’étoile chaque regard
sans dénommer ceux qui s’y désaltèrent.
1991
Poèmes non écrits
Images non peintes
Pensées non réfléchies
Il me faut trois images pour passer la tienne.
*
Mots croisés dans un baiser
je tiens votre imprononçable bouche
si quelque chose bouge
c’est le toit du monde.
*
Là où les passants s’étaient faits rares
Il importait de dénouer certaines essences de fleurs
Pommes rouillées.
Il y allait des plus vieilles idées
sans lunes.
*
Le chemin de l’éclair
comme le sang
ne connait pas le retour.
*
Chaque femme qui s’ouvre en deux
est poursuivie d’infini
chaque femme qui replie son geste
poursuit l’infini.
*
Mille plumes à la volée n’ont pas lassé ce baiser que tu ne m’as pas encore…
*
Elle ne sait marcher que sur les toits
Un pas devant l’autre est son éternité.
*
La belle nymphomane est sortie de la viergerie.
*
Chair qui n’est que chair meurt
Esprit qui n’est qu’esprit ne nait
Leur seule alliance entre en perpétuité.
*
L’apparence d’un faune et la vapeur d’une locomotive ont traduit, pour l’Iroquois, les chants de l’amour et du nord.
*
Le roi est dans tous ses états
Dieu qu’il va vite.
*
A la volupté s’arrête le rêve
Tout est là lui compris
et j’aime si là s’arrête le rêve.